A-t-on le droit de critiquer le juge Gentil ?


Un son de cloche familier

L’affaire Bettencourt nous intéresse très moyennement et n’évoque pas grand chose aux familles meurtries par des accusations aberrantes sur rapports de travailleurs sociaux. Ce qui nous est par contre familier c’est le dialogue entre le juge et le président, comme un son de cloche d’une terrible violence institutionnelle que nous avons aussi pu subir.

Le face à face de ce 21 mars 2013 est terrible.

Apprenant sa mise en examen pour abus de faiblesse, Nicolas Sarkozy parle d’une «grande injustice ». Le juge le reprend et considère que ce propos est injurieux. Ce à quoi, l’ancien président répond : « Non, c’est une injustice et j’ai la liberté de dire et de penser ce que je veux », le juge veut alors mettre fin à l’audition par ces termes : « c’est une injure et maintenant c’est terminé ».

« Non, ce n’est pas terminé », le juge prend alors cette déclaration comme une « menace » et veut la faire inscrire par sa greffière.

On comprendra que ces deux là ne partiront pas en vacances ensemble, Maître Thierry Herzog s’interroge d’ailleurs sur l’impartialité du magistrat co-signataire d’une tribune qui, selon lui, mettait en cause la politique de Nicolas Sarkozy et dénonçait le « désengagement de l’État ».

Voila en tout cas de quoi acter une prophétie tenue au salon de l’agriculture.

Psychodrame

Une menace, Jean-Michel Gentil, le juge en question, en recevra d’ailleurs une la semaine suivante dans un courrier contenant des cartouches à blanc. Les menaces de mort émises par un soi-disant groupuscule des forces de l’ordre sembleraient pourtant ne pas s’adresser directement à sa personne : 

« Certes vous êtes physiquement bien protégé, nous ne sommes pas encore en mesure d’intervenir dans le Sud-Ouest. Qu’à cela ne tienne, l’un des vôtres va disparaître dans un secteur géographiquement plus proche et beaucoup moins risqué. Celui-là va payer de sa vie votre volonté discrétionnaire de déstabilisation du pays par votre assujettissement à la gauche totalitaire, soixante-huitarde » 

Voila qui inquiète en tout cas le juge et ses collègues du parquet de Bordeaux, suffisamment pour que l’anti-terrorisme soit illico saisi et déploie sa protection. Notons en passant que si l’anti-terrorisme devait protéger l’ensemble des personnalités et anonymes qui recevaient ce genre de gracieusetés, il embaucherait davantage que la mal-nommée « aide sociale à l’enfance », ce qui n’est pas peu dire.

On ne dit pas « casse toi pov juge » !

L’occasion est bonne d’enfoncer le clou de la politisation. Le bien à gauche syndicat de la magistrature (SM) en profite pour mettre en cause ceux qui s’en prennent au magistrat :

« la violence des propos de la ‘garde rapprochée’ de l’ancien président et l’œuvre de décrédibilisation de la justice à laquelle elle s’est livrée ne peuvent que susciter l’incompréhension des citoyens, la perte de confiance en l’institution judiciaire et, pour finir, l’insupportable déchaînement de haine envers les magistrats chargés de rendre la justice (…) chacun doit faire preuve de la plus grande responsabilité dans ses propos et dénonçons fermement cette intolérable escalade de violence. » 

Rajoutons pour faire bonne mesure que le même canal ayant adressé des menaces au sourcilleux magistrat en a également envoyé à des journalistes le 20 mars 2013 soit avant la mise en examen de Nicolas Sarkozy. Voila qui devrait donc rendre insignifiantes les mises en cause du syndicat de la magistrature.

Mais visiblement ce détail n’est pas un problème pour le club des autoproclamés défenseurs de la justice. Club dont fait partie intégrante le parti communiste, par la voix de son porte-parole :

« Quand certains responsables de premier plan de l’UMP s’autorisent des propos injurieux et outranciers visant le juge, quand la garde rapprochée de Nicolas Sarkozy assume une mise en cause publique de l’impartialité de la justice, comment ne pas établir un lien entre cette escalade dans l’opération de déstabilisation du juge gentil et les menaces de mort visant les magistrats ? »

Appel à la répression

Quant à l’autre grand syndicat de magistrat, l’USM, sa secrétaire Virginie Duval vient, à sa façon, nous apporter la preuve du caractère criminel des critiques. Elle prétend en effet que le lien avec les menaces de mort est « direct, évident (…) Voilà ce qui arrive quand certaines personnalités politiques se croient autorisées à critiquer et insulter. »

Quoi vous n’êtes toujours pas convaincu ? Sachez alors que la secrétaire générale de l’USM a pu constater que : « Depuis vendredi, on n’arrête pas de recevoir des menaces, des insultes. On a eu 50.000 connexions sur notre page Facebook, plein de messages disant +justice pourrie+ (…) Ce type d’insultes se produit « régulièrement » quand des personnalités mettent en cause la justice de cette manière. »

Décidément on ne peut manquer de considérer l’opportunité de telles menaces pour faire accroire qu’il suffirait de critiquer un magistrat pour le mettre en danger de mort…

La dernière couche est rajoutée par la garde des sceaux, Christine Taubira, laquelle saisit le CSM, dont on a pu s’interroger sur l’utilité, afin qu’il puisse éventuellement gronder qui de droit en commentant « les conséquences (…) sur le bon fonctionnement de l’institution judiciaire et sur la sérénité de la justice » des propos des vilains qui critiquent le juge. Sans attendre la décision du CSM, Taubira a d’ailleurs fait la leçon en parlant de « propos inadmissibles dans un État de droit ».

L’union syndicale des magistrats (USM) lui fait écho en demandant au CSM « d’envisager des poursuites pénales contre de tels propos qui nuisent à l’ensemble des institutions d’un Etat de droit. »  

Drôle de conception de l’État de droit, nous y reviendrons.

Henri Guaino, l’ancien conseiller spécial de Nicolas Sarkozy est directement visé par tout ce battage pour avoir dit que le juge Gentil avait déshonoré et sali la justice française. Il répond :

« Évidemment, les menaces de mort contre n’importe qui sont insupportables et totalement condamnables, mais je trouve que la position prise par le syndicat de la magistrature est effrayante (…) Je ne me sens à aucun moment responsable de ça ».

Molotov, une référence

Une effrayante position du syndicat de la magistrature, c’est bien le mot employé. Effrayante, autant qu’une conception liberticide de l’État de droit. On pense là à la citation de Molotov : « le rôle de la constitution soviétique n’est pas de protéger les citoyens contre l’État, mais de protéger l’État contre les citoyens ! » 

Nous verrons donc si le CSM partage cette conception en protégeant la justice des français plutôt qu’en la mettant au service du peuple.

La fin des Ponce Pilate ?

L’opération d’agit-prop lancée par une certaine magistrature orientée pourrait bien se retourner contre elle. Soyons clair, l’affaire Bettencourt est l’arbre qui cache la forain, elle n’intéresse plus grand monde. Ce à quoi nous assistons relève des suites d’un règlement de compte entre des magistrats et l’ancien président de la république qui avait mis en cause des juges du temps de sa présidence.

Ce à quoi nous assistons c’est aussi à une prise de responsabilités de certains politiques dont l’intégralité se complaisait dans une attitude digne de Ponce Pilate.

Rappelons cette fameuse lettre envoyée aux familles se plaignant des suites judiciaires d’exactions perpétrées par des travailleurs sociaux :

« Sensibles à la situation dont vous nous faites part (…) mais du fait de la séparation des pouvoirs et de l’indépendance de la justice, nous sommes désolés de ne pouvoir intervenir dans votre affaire, mais nous vous conseillons de vous rapprochez d’un avocat …. »

Visiblement Nicolas Sarkozy n’a pas reçu la même réponse. Mieux certains parlementaires tels Laurent Wauquiez ne comprennent pas pourquoi dans une démocratie, il ne serait pas possible de critiquer les juges.

Voila en effet une conception plus juste de l’Etat de droit. Rappelons à Taubira et aux autres que l’État de droit suppose l’égalité de tous devant le droit et donc l’absence de privilèges, ceci suppose que nul n’est au-dessus des critiques qu’il soit cantonnier ou juge !

Que les députés de l’opposition aillent donc au-delà de positions de principe, sous peine d’être suspectés de ne défendre que les intérêts de l’ancien président. Ils ont ouverts une brèche et celle-ci ne doit pas se refermer. Qu’ils commencent donc par abroger la loi relative à l’outrage à magistrat et que l’on ouvre ensuite les livres noirs des exactions publiques.

9 réflexions au sujet de « A-t-on le droit de critiquer le juge Gentil ? »

  1. Nous avons tous le droit de critiquer un Juge ou une Juge car avant d’ être juge ils sont d’abord homme ou femme, avec leur propre faiblesse, surtout que il ou elle ne possède pas une totale impartialité.

  2. oui ! sinon c’est la liberté d’expression qui est en jeu , mais on a le droit de critiquer tout le monde ! il peut y avoir débat sur l’indépendance de la justice là ok . après nous n’avons pas attendu cette affaire pour critiquer les magistrats et surtout la remise en cause de l’ENM . il me semble que le mal vient de là . après l’indépendance du parquet ??? me laisse sceptique .

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  3. Si…nous étions dans une vraie de vraie démocratie et non dans un état policier(1), il y aurait moins de corruption, de scandales, etc. donc moins d’injures.
    Si…nous étions…les institutions justice, police, gendarmerie, sociales…etc. se mettraient régulièrement en question et rectifierait le « tir » (entre autre en dédommageant les victimes de leurs errements)
    Si…nous étions… les écoles préparant et menant à ses hautes fonctions tiendraient compte dans leurs programmes d’éducation des erreurs et errements…afin qu’elles ne se reproduisent plus.
    Si…nous étions…les hauts fonctionnaires, les petits fonctionnaires, les juges, policiers/gendarmes…bref toute personne ayant le pouvoir de vous nuire intentionnellement ou pas, devraient rendrent des comptes.

    S’il s’avérait, entre autre « prouvé selon la notoriété publique »(2) que c’est une erreur « erreur » l’état devrait indemniser à hauteur de 500 € par jour d’incarcération, un capital de 100000 € en plus des frais réel (avocats, frais Km, détectives privés…etc).
    S’il s’avérait, entre autre  » prouvé selon la notoriété publique »(2) que c’est une « erreur » intentionnelle le tout devrait être multiplié par 2. et la personne incriminé représentante de l’état devra être licencier, perdre ses droits civiques, et selon son âge perdre sa retraite ou n’avoir plus que le minimum vieillesse.

    (1) état policier : mis en place par napoléon 1 (celui qui avait rétablit l’esclavagisme et la lettre de cachet tout en remplissant les cimetières par ses opposants et les soldats par millions)
    (2) …selon la notoriété publique : l’administration française fait un grand usage de ces mots, qui sont inscrit en toutes lettres dans le droit français

  4. « …On pense là à la citation de Molotov : « le rôle de la constitution soviétique n’est pas de protéger les citoyens contre l’État, mais de protéger l’État contre les citoyens ! »… »

    Idem pour la France (je dirais même pour 98 % des pays se disant rois des libertés, déjà d’actualité du temps de la monarchie, puis napoléon 1 a renforcé cet état de fait avec sa constitution, qui avec une lecture superficielle semble « parfaite »…mais à la deuxième lecture l’état policier suinte de partout.
    (napoléon1 le bienfaiteur qui avait rétablit l’esclavagisme et la lettre de cachet, tout en remplissant les cimetières de ses opposants ou présumé tel sans oublié les millions de soldats et les victimes collatérales

    Jean-Luc LUMEN

  5. Contradictoirement à Démocratie nous sommes satisfaits d’être gouverner-terme intimement lié à dictature-au lieu d’être représenter!
    Dés lors quand reconnaitrons-nous que le petit du serpent est un serpent?
    Bien que nous le sachions!
    Les lois sont faites pour être contournées par ceux qui les font!
    L’os à ronger jeté par Gentil à la face de la populace,pour redorer la toge ternie , est sans moelle et tombera vite en poussiére conformément au contrat signé pour être en place dont l’article 1 stipule: qu’il a droit de japper sachant qu’en tant que petit chien de la chienne d’un gouvernement il ne peut comme sa mére mordre celui qui le commande et le nourrit;d’ailleurs il se sait tout petit ce toutou mais fera tout pour ne pas le reconnaitre.

  6. Hollande:
    Pendant que des milliers de personnes dorment dans des cartons et plus encore « pointent »aux restos du coeur,la priorité de Hollande est de donner 2,5 milliards d’euros sur les 10 alloués par l’Europe à l’état mafieux qu’est(entre autres) Chypre mais aussi de ne surtout pas s’attaquer aux 110 milliards de sueur des humbles planqués par la mafia française étatisée et protégée par LEUR JUSTICE en Suisse ainsi qu’aux 690 milliards(connus) dans les autres paradis fiscaux!
    Hollande se dit NORMAL,c’est à dire pas différent des autres et il le prouve!
    Cette personne est hautement malhonnéte et de loin plus encore que son prédecesseur qui lui ne cachait pas son objectif d’écraser « les étrangers » de sa caste mafieuse.
    Les lois existent pour combattre la malhonnétété mais ne sont pas appliquées à cause de nous les humbles qui somment rongés par la peur de reconnaitre que nous sommes les vrais maitres de notre vie et de notre pays!
    Mon grand-pére m’a toujours dit « qu’il n’y avait pas d’Hitler sans hitlériens »!
    Que les humbles HONNETES déclanchent « le printemps »au nom de Liberté Egalité Fraternté,tant galvaudées par leurs soits-disant gardiens,,,bien avant l’armée et la justice »à la Molotov » les premiers ennemis auxquels ils seront confrontés seront leurs fréres et leurs compagnes avec lesquels ils partagent leurs tables au quotidien.

    1. Et pour faire diversion le pouvoir en place nous ressort la « lutte contre les paradis fiscaux » ou la « moralisation de la vie publique ». Fumisteries que tout cela dans l’enfer fiscal et réglementaire qu’est ce pays.

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