Primauté du droit et abus de pouvoir de l’ASE

Cour de Justice de l'Union Européenne
Cour de Justice de l’Union Européenne
Les Etats ne sont pas au-dessus des lois

En interpellant les instances européennes sur la situation qui a été faite à mon fils et à moi-même en France et en Belgique, j’ai voulu mette en valeur la « Primauté du droit européen». En effet cette affaire concerne deux états membres, et la primauté du droit européen et même international impliquait que les Conventions internationales ratifiées par ces Etats puissent avoir un impact en droit interne. Le respect de l’Etat de droit suppose effectivement que toute personne a des droits mais aussi des devoirs, et que parmi ces personnes se trouve aussi l’Etat lequel ne saurait se situer au-dessus du droit donc de ses obligations vis-à-vis de ses ressortissants.

Selon le principe de primauté, le droit européen a une valeur supérieure aux droits nationaux des États membres. Le principe de primauté vaut pour tous les actes européens disposant d’une force obligatoire. Les États membres ne peuvent donc pas appliquer une règle nationale qui serait contraire au droit européen.

Les tribunaux doivent faire respecter l’équitabilité des jugements

Il serait intéressant de relever « une question préjudicielle » en fonction des droits communautaires, La question ne peut porter sur le fond de l’affaire, mais sur l’interprétation d’une ou plusieurs normes de l’Union. La réponse de la Cour de Justice de l’Union Européenne est définitive et contraignante en ce qu’elle s’impose aux  États membres.

Il serait pertinent que la Cour de Justice de l’Union Européenne fasse respecter le principe d’un jugement équitable et donc puisse constater dans les États de l’Union Européenne que tout tribunal manquant de récuser un service social qui n’honore pas des ordonnances judiciaires, viole son caractère d’indépendance et d’impartialité.

Un tribunal ne peut donner prééminence aux intérêts des institutions sur les intérêts de la personne humaine, sans faire preuve de « violences institutionnelles »., ou encore sans enfreindre le principe de « l’égalité des armes ».  Toute personne a droit à un procès équitable. Conformément aux mécanismes internationaux de protection des droits de l’homme qui dispose que «tous sont égaux devant les tribunaux et les cours de justice», ce refus de contradictoire peut aussi constituer une discrimination.

Les abus de l’ASE doivent être sanctionnables et sanctionnés en droit

Un juge dans l’exercice de ses fonctions ne peut violer ses engagements pour le respect des lois, ainsi que pour la jouissance des libertés et des droits fondamentaux proclamés à la personne humaine, ces immixtions arbitraires ou illégales dans le respect de sa vie familiale, ne peuvent être tolérées que si elles sont justifiées par des intérêts supérieurs et non pas pour rendre service à l’institution ASE qui n’honore pas son agrément.

Bruno Terriou

Les juges des enfants vont en rabattre

Le juge Michel Huyette, que l’on pourrait difficilement considérer comme un de nos alliés, s’interroge sur la fonction de juges des enfants (http://www.huyette.net/article-la-partialite-du-juge-des-enfants-qui-instruit-puis-preside-le-tribunal-pour-enfants-78931916.html).

Une mise en question qui, malheureusement, est loin de faire l’unanimité chez les magistrats qui pleurent déjà sur une disparition fantasmée des JDE et sur des postes en moins.

C’est une QPC, la fameuse question prioritaire de constitutionnalité, soumise par un justiciable dans le cadre de son affaire qui a pu faire bouger la loi en mettant en évidence devant le Conseil Constitutionnel les atteintes au droit à un procès équitable et à une juridiction impartiale que fait peser le juge des enfants.

Sans entrer dans les détails de cette QPC relative aux fonctions du JDE et à la collégialité des décisions (fait qu’un jugement soit émis par plusieurs juges et non un seul) en matière pénale face à la délinquance de mineurs, problématique assez éloignée de nos affaires, il apparaît que le Conseil Constitutionnel a déclaré inconstitutionnelle la loi qui fait que le juge des enfants puisse cumuler les fonctions de juge d’instruction (le juge qui enquête sur les éléments de l’affaire) et de membre de la formation du jugement (le juge qui donne un verdict).

Ce qui est termes juridiques made in Conseil Constitutionnel s’énonce ainsi : « (…) que, toutefois, en permettant au juge des enfants qui a été chargé d’accomplir les diligences utiles pour parvenir à la manifestation de la vérité et qui a renvoyé le mineur devant le tribunal pour enfants de présider cette juridiction de jugement habilitée à prononcer des peines, les dispositions contestées portent au principe d’impartialité des juridictions une atteinte contraire à la Constitution ; que, par suite, l’article L. 251-3 du code de l’organisation judiciaire est contraire à la Constitution. »

En effet, on ne saurait préjuger de la culpabilité d’un prévenu à travers une instruction à charge quand bien même elle est censée « parvenir à la manifestation de la vérité », comme l’indique Michel Huyette : « les juges qui se prononcent sur la culpabilité et sur la peine doivent aborder l’affaire avec un regard entièrement neuf et sans avoir auparavant pris position sur le dossier. »

 Contrairement à beaucoup de ses collègues et aux « professionnels de l’enfance en danger », Michel Huyette appuie donc cette réforme légale appelée à entrer en vigueur le 1er janvier 2013 (pourquoi si tard ?) avec des arguments que nous pouvons facilement reprendre :

  •  pendant des dizaines d’années le principe de spécialisation de la juridiction des mineurs, tant au civil qu’au pénal, à été élevé comme paravent à toute approche critique des pratiques et, surtout, à un contrôle rigoureux du cadre juridique. Autrement dit, l’argument sans cesse utilisé comme bouclier était en substance : « Nous sommes des professionnels qui ont pour mission d’aider les jeunes et leurs familles, ce que nous faisons est bon pour eux et dans leur intérêt, puisque nous sommes spécialisés nous savons parfaitement ce que nous faisons et qui est toujours approprié, donc ne venez pas vérifier quoi que ce soit, la justice des mineurs est et doit rester telle qu’elle est. »
  • Les violations des règles procédurales étaient monnaie courante, et c’est peu dire que de nombreux droits fondamentaux étaient journellement bafoués. On
    se rappelle (je le cite souvent car ce fût tellement révélateur de l’état d’esprit d’alors..) avec quelle force d’innombrables professionnels, au sein desquels des magistrats
    virulents, se sont mis debout pour empêcher le plus longtemps possible que les familles aient accès à leur dossier comme dans toutes les autres juridictions y compris la juridiction des affaires familiales.  Certains, y compris des magistrats, ont prédit la fin du monde si des parents pouvaient venir lire les rapports au greffe. Il a fallu (une fois de plus) la CEDH et des années de combat pour que, enfin, la loi soit changée en ce sens. Et que l’on constate aussitôt que cela ne pose jamais la moindre difficulté.
  • Ce que l’on a constaté alors, au-delà du seul problème juridique, c’est que personne n’acceptait de faire rentrer les droits fondamentaux des jeunes et de leurs parents dans les tribunaux pour enfants.
    Les approches en terme de droit ou de respect des personnes étaient traitées avec mépris, avec déjà et comme mentionné plus haut le prétexte d’une spécificité
    de la juridiction qui devait permettre aux professionnels de faire ce qu’il voulaient et quand ils voulaient. L’arrivée des familles au greffe était vécue comme une intrusion inacceptable portant en soi le germe, insupportable, d’une critique plus approfondie et plus argumentée des pratiques judiciaires.
  • La juridiction des mineurs était comme une bastide imprenable. Toute tentative de créer une brèche dans le rejet quotidien du droit des justiciables étant aussitôt l’objet de virulentes attaques. On a même pu lire à l’époque que ceux qui prônaient plus de respect des principes juridiques fondamentaux étaient exagérément « légalistes ». Comme si le juge n’avait pas comme préoccupation première de respecter le cadre juridique en vigueur. Nous avons vécu alors certains moments véritablement ahurissants au regard de l’éthique et du respect des personnes, quotidiennement ignorés par des magistrats que la constitution fait pourtant gardiens des libertés individuelles (article 66, texte ici).
  • La difficulté apparaît également s’il est demandé au juge des enfants, quand il préside le tribunal pour enfants, de prendre juridiquement position sur une éventuelle erreur procédurale commise par…. lui-même au cours de la phase d’investigation. Peut-on raisonnablement demander à un magistrat d’être le contrôleur de ses propres actes ? Cela ne se produit nulle part, dans aucune autre juridiction.
  • Il faut aussi avoir en tête que dans la période qui précède le jugement, il peut se produire divers incidents. Il arrive que le juge des enfants soit agressé verbalement (plus rarement physiquement mais cela se produit aussi, j’en atteste..) par un mineur, ou que celui-ci s’oppose à tout, ou que les parents développent une stratégie de harcèlement. Bref, avant l’audience de jugement un lourd passif s’est parfois installé entre le juge et ses interlocuteurs. Est-il alors acceptable que le mineur se retrouve au moment de l’audience de jugement devant le magistrat qui aura forcément en tête cette succession d’incidents, ou, pour le dire plus simplement, qui l’aura dans le collimateur ?
  • Enfin, le risque de partialité apparaît tout autant si avant jugement le juge des enfants a pris une mesure provisoire coercitive, par exemple un placement en service éducatif  contraignant, et que le mineur et son avocat contestent à l’audience l’opportunité d’une telle mesure, éventuellement avec des arguments sérieux déjà développés devant le magistrat mais que celui-ci a plusieurs fois de suite rejeté au cours de la phase antérieure. Par exemple, est-il facile pour un mineur, ses parents, ou leur avocat, de plaider devant le tribunal pour enfants présidé par le juge « X » que si le placement en CEF s’est mal passé c’est, pour une grande part, parce que cette décision était mauvaise et manifestement inadaptée à la situation comme ils l’avaient soutenu dès le départ, ce qui peut parfois être le cas, alors que celui à qui ils s’adressent est le même juge « X » qui l’a décidé ? Cela revient une fois encore à demander au juge-président d’exercer un regard critique sur les décision du juge-investigateur, autrement dit sur lui-même.
  • Sans doute peut-on comprendre que pour certains juges des enfants, habitués depuis des années à travailler sans aucun contrôle réel au quotidien, il soit difficile d’admettre que d’autres puissent porter un regard éventuellement différent sur la situation de mineurs qu’ils suivent. Chez certains, la crainte que puissent être décelées des incohérences, des failles, voire des erreurs dans leurs pratiques ou leurs décisions explique probablement en partie le discours protectionniste visant, consciemment ou non, à faire obstacle à toute ingérence dans leur périmètre de travail.
  • L’intérêt du juge n’est pas l’intérêt des mineurs jugés.  Il est temps que l’ordre des priorités soit inversé.

Voila donc, tout n’est pas du même tonneau chez le juge Huyette, mais on doit bien le créditer des propos ci-dessus que je vous invite à lire dans leur contexte à l’URL précité.

Tout de même il convient de rajouter que les familles n’ont en réalité accès au dossier d’assistance éducative dans des conditions telles que cet accès ne leur permet pas de préparer de la façon la plus efficace leur défense. Ce dossier est d’ailleurs inaccessible une fois l’affaire jugée. Nous ne pouvons que renvoyer à ce sujet aux articles suivants :

https://comitecedif.wordpress.com/2011/04/11/resister-aux-services-sociaux/

https://comitecedif.wordpress.com/2011/04/20/communication-du-dossier-dassistance-educative/