La destruction des familles : un marché public rentable


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Le business des lieux de vie

On parle de lieu de vie et d’accueil (LVA) afin de  qualifier une structure intermédiaire de placement de mineurs située entre la famille d’accueil (petite structure) et le foyer (structure importante). Les LVA sont donc prévues pour le placement de petits groupes d’enfants soustraits à leur famille. La Creuse compte 11 de ces lieux de vie. Ah la Creuse, ses traditions, ses enfants déportés de la Réunion …Mais chut, c’est le passé ça, ça n’arriverait plus maintenant tant les bonnes intentions ont pris le dessus.

Il faut préciser qu’un tel type de structure appartient à l’économie sociale et solidaire, même si la forme est sociétale, dans la mesure où son objet est de satisfaire un besoin collectif. Il s’agit en l’espèce de placer des enfants dans leur propre intérêt – on parle d’enfants en danger – sachant que ce besoin n’est pas solvable sur un marché libre.

Bon ça c’est pour le côté responsabilité sociétale et environnementale tellement à la mode, comme quoi l’hypocrisie est dans l’air du temps pour le bonheur de nos saigneurs.

Soyons donc un peu plus sérieux à défaut d’être cyniques. Disons-le, un lieu de vie et d’accueil peut s’avérer très rentable aux frais des contribuables et permettre d’élaborer des projets ronflants qui, sur le papier, font se pâmer les journalistes mainstream permettant, par là-même d’assurer une communication institutionnelle. Outre les financements publics, un buzz bien géré attire des financements supplémentaires par l’éventuel occupation d’enfants dans des activités lucratives ou générant des dons ou participations.

On ne le dira jamais assez l’investissement dans des zones de placement a le vent en poupe puisque l’État anticipe une augmentation sans fin des enfants à capter et créé de nouvelles lois qui le permettent (loi sur les violences éducatives ordinaires, bannissement de l’école à la maison, …).

Dans le même temps ces structures ne font pas l’objet de contrôle sérieux, c’est le moins que l’on puisse dire. Donc ni vu ni connu, je t’embrouille.

Le paradis des pauvres gosses

Parmi ces LVA, citons-en un qui a fait l’objet d’une importante curiosité médiatique. Il s’agit du lieu de vie « Parcours Le Dognon », situé dans le hameau éponyme à trois kilomètres de Saint-Maurice-la-Souterraine. Le Dognon possède un agrément renouvelé en mai 2021 pour l’accueil de 4 enfants de 6 à 18 ans. La structure est gérée par ANVIE (anciennement RESO Labonde) et héberge en pratique des enfants de 10 ans  mais aussi de jeunes majeurs jusqu’à 21 ans pour des séjours assez courts.

Le projet de ce lieu de vie semble suffisamment élaboré pour générer un financement de différentes ASE départementales dans toute la France à hauteur de la bagatelle, excusez du peu, de 550 euros par jour et par enfant[1]. Le projet éducatif porte sur le maraichage et l’élevage. Bon ?!

Le journal « La Montagne » ne tarit pas d’éloges sur ce projet, lequel est présenté dans un article dédié du 27 septembre 2022 : « Comment des jeunes en difficulté (re)découvrent le vrai goût de la vie dans une ferme en Creuse ». Le titre est tout un programme, celui du vrai goût de la vie, hein, pas le faux. On y apprend que « Le long de la route principale du Dognon de Saint-Maurice-la-Souterraine (Creuse), se cache un ancien corps de ferme centenaire rénové. C’est ici que se trouve le lieu de vie Labonde (…) Dirigé par Thomas Voeltzel, le RESO Labonde (ndlr devenu ANVIE en 2024) a pour but de proposer à l’accueilli(e) un endroit dans un cadre structurant, rassurant et valorisant où il peut redécouvrir la vie de famille et ainsi se reconstruire. »

Les quatre jeunes venus de région parisienne s’adonnent au maraichage, et un d’eux est même devenu incollable sur la question des fruits et légumes. Écoutons son directeur, Régis Deschamps, louer la lutte contre l’oisiveté, l’ouverture à la responsabilisation, à l’autonomie : « En plus de participer à la vie de la maison, le jeune est présent aux soins des animaux, au jardin, à divers bricolages (…) L’ensemble du lieu de vie est centré sur une démarche écologique, de respect de la terre et de son environnement ».

Un nouvel article de « La Montagne » est consacré il y a moins d’un an à la journée portes-ouvertes, puis un autre en décembre où l’on apprend qu’une partie de la récolte de légumes a été offerte aux Restos du Cœur, comme le précise son directeur. Une publicité sur laquelle le lieu de vie n’hésite pas à banquer et qui est d’ailleurs toujours accessible (https://anvie.org/le-dognon-ouvre-ses-portes/).

Ce même directeur est interviewé dans une chronique du 8 janvier 2024 pour la radio RMJ, il évoque la transformation de l’organisation, le RESO Labonde devenant le groupe ANVIE (Action nouvelle pour la valorisation, l’insertion et l’éducation https://anvie.org/) aux multiples ramifications : « Le groupe « anvie », ancien réseau labonde, qui s’occupe de jeunes en difficultés, fait son bilan annuel. Une année 2023 positive pour la maison d’accueil située au Dognon en Creuse. Régis Deschamps le directeur de la structure au micro RMJ de Florian Meilhac, nous parle de cette année et du futur de la maison d’accueil, avec Benjamin, un des permanents et Lisianne, dessinatrice et illustratrice nous parle des ateliers qu’elle fait avec les jeunes. La chronique du jour est présentée par Florian Meilhac (RMJ). »

Autocongratulation donc du directeur qui fait part, et c’est tout à fait intéressant, des retours très positifs de l’ASE : une structure exemplaire il n’y a pas à dire avec intégration de professionnels comme des nutritionnistes, des psychothérapeutes, une art-thérapeute, un potier, un tailleur de pierre, un intervenant en soutien scolaire, un clown burlesque. Les enfants en souffrance peuvent donc extérioriser leurs traumatismes. On est loin, très loin de la privation de soins, et pourtant …

Le vrai goût de la vie

Moins d’enthousiasme trois mois plus tard et virage à 180 degrés de La Montagne qui nous en dit plus à la suite d’une actualité judiciaire inattendue.

Voilà donc que nos journalistes ont un doute et nous parlent sous, oseille, picaillon.

D’abord, ce lieu de vie devant accueillir 4 enfants, en hébergeait en réalité un cinquième.

La belle affaire me direz-vous, à l’heure où les sociaux font exploser les capacités d’accueil ! Comprenons-nous bien, Le Dognon ne disait pas « quand il y en a pour quatre il y en a pour cinq », non, toujours selon l’article du 30 mars 2024, le cinquième enfant était caché mais permettait bien de percevoir les 550 euros supplémentaires, soit en tout 2 750 euros par jour. De quoi faire des cadeaux au Restos du Cœur ?

Il aurait suffit de contrôler, mais le social est d’autant plus rentable que les contrôles sont une plaisanterie. On est  loin des tracasseries subies par le petit entrepreneur dès que l’URSSAF, le fisc ou l’inspection du travail pointe le bon de son nez. Non ici, il suffit en principe de déclarer soi-même les effectifs d’enfants chaque mois. Cécile Daudonnet, directrice du pôle enfance du conseil départemental de la Creuse avoue avoir du mal à communiquer avec ANVIE, gestionnaire des lieux. Il existe bien un contrôle inopiné  une fois par an mais cela se limite à du déclaratif, dit-elle.

Rentable, aux frais du con tribuable bon citoyen, et pour le contrôle on est crû sur parole. A priori un business qui roule au pays du Tout État. Comment s’expliquer alors les ennuis du Dognon ?

On apprend effectivement que le site est fermé, que la mise en examen du directeur est allée jusqu’à la détention provisoire alors que les quatre enfants âgés de 10 à 17 ans ont été déplacés dès le 22 mars 2024.

Serait-il possible que leurs conditions de vie furent pires que dans leur famille ? Dans une société où la propagande d’État criminalise l’institution familiale, où les placements abusifs n’existent évidemment pas, penser une chose pareille serait un délit – enfin le sera bientôt -. Qu’a donc fait cet entrepreneur social avisé, directeur salarié du lieu de vie, pour se retrouver au  dépôt ?  Violence aggravées sur mineur de moins de 15 ans, travail forcé, conditions de travail indignes et défauts de soin. Quand même … Bon, on retient encore la présomption d’innocence, vous savez celle qui est tellement respectée dans les cabinets des juges des enfants.

Un contrôle a finalement permis de relever ces faits ? Pensez-vous !

Tout remonte à un malaise d’un des enfants le 21 mars 2024, le gamin se retrouve aux urgences de Guéret, et là, oh la boulette il peut libérer sa parole face à un urgentiste intègre non conscient des vertus du travail enfantin dans la joie ! Le gamin parle des méthodes d’encadrement plus que viriles, du travail forcé. Comme quoi le « vrai goût de la vie » vanté un moment par « La Montagne » devait avoir la saveur de la sueur, des nausées et des baffes dans la gueule. Ce qu’il restera à prouver vu le crédit que l’on accorde à la parole des gosses.


[1] La moyenne de financement par enfant et par jour tourne plutôt autour de 250 € dans les autres LVA, ce qui est déjà trop rentable, d’autant que c’est toi qui paie.

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