Les dégâts de l’exercice illégal de la médecine par les travailleurs sociaux
Je vous remercie de m’accorder la parole et effectivement je pense avoir des éléments importants à fournir aux parents d’enfants « différents » à travers mon expérience de mère.
Très généralement, lorsque des enfants sont atteints d’une maladie physique particulière ou lorsqu’ils souffrent psychiquement, les travailleurs sociaux sont les derniers à pouvoir intervenir, en effet ils ne sont nullement qualifiés dans les domaines psychologiques et médicaux. C’est donc en tout exercice illégal de la médecine qu’ils prennent le droit d’intervenir hors de leur domaine de compétence, ils le font en permanence avec des conséquences dramatiques.
Quand l’enfant manifeste sa différence
Un enfant différent ou qui ne va pas bien fera preuve d’un comportement déroutant au sein de l’institution scolaire. Qu’il soit suivi, accompagné à la maison par des professionnels compétents n’y changera rien avant qu’il n’aille mieux.
Mais cette situation est dangereuse pour l’enfant, pour sa famille, car son malaise va énerver les enseignants, mobiliser des psychologues scolaires, des adultes qui pensent pouvoir trouver des solutions face à des parents qu’ils jugent mal.
Des témoignages édifiants
Des familles ont été détruites par ces malencontreuses interventions de pseudo-spécialistes.
Je pense en particulier à la maman de ce petit garçon « précoce ». Un psychologue scolaire pas forcément formé à la précocité avait établi un quotient intellectuel de 121 pour l’enfant. Un QI bien au-dessus de la moyenne qui a valu de bonnes doses de ritaline (psychotrope) afin que ce petit garçon cesse d’être agité en classe !
Il est tout à fait incompréhensible qu’un psychologue scolaire traite ainsi la précocité qui n’est pas une maladie mais une opportunité supplémentaire pour cet enfant … et une charge pour des enseignants incapables de satisfaire son besoin d’apprendre plus vite. La médiocrité est plus facile à gérer au sein de l’éducation nationale.
Je parle en connaissance de cause puisque ma fille a été détectée « haut potentiel », un terme plus proche de la réalité que « précoce ». Cette différence s’est ressentie dans son adolescence avec un épisode anorexique à 15 ans, puis un épisode dépressif et, dramatiquement, une tentative de suicide à 16 ans.
Je précise qu’elle ne sera détectée « haut potentiel » qu’après avoir subi ces terribles épisodes dépressifs, elle n’était passée à l’acte que parce qu’elle ne supportait pas sa différence, ce qu’elle ressentait, qu’elle ne comprenait pas pourquoi elle appréhendait différemment son environnement.
La fonctionnaire du social
Je vous passe mes angoisses, questionnements, remises en question, mes nuits blanches à chialer comme une folle en me demandant ce qui se passait, ce que j’avais loupé, etc…
Suite à cette tentative de suicide, une information préoccupante a été envoyée à l’ASE par la gendarmerie.
Deux mois plus tard, j’ai reçu une convocation des services sociaux.
J’ai reporté plusieurs fois le rendez-vous, parce que je ne voyais pas bien l’intérêt de leur intervention face à ce que nous étions en train de vivre, surtout je ne voyais pas bien l’aide que ces gens pourraient bien nous apporter.
Mais en bonne exécutante du social, la dame au téléphone ne cachait pas son agacement : on lui avait envoyé une information préoccupante, il y avait une procédure à suivre. Elle avait trouvé une bonne cliente !
Je lui ai donc envoyé un courrier, avec le détail de l’accompagnement de mon enfant : centre spécialisé avec des professionnels formés pour suivre des jeunes filles anorexiques, ateliers thérapeutiques deux matinées par semaine, qui lui prenaient sur son temps scolaire, lui ajoutaient un stress supplémentaire avec les cours à rattraper, l’impression de se noyer dans les exigences des uns et des autres, et une équipe pédagogique au collège peu concernée pour mettre en place un aménagement de son temps scolaire, qui l’aurait pourtant bien aidée. Sans compter la grosse déprime, la dépression, la tentative de suicide ; son hospitalisation dans l’unité Ados de l’hôpital, son accompagnement par une batterie de professionnels de la santé…
Bref : je lui ai fait un topo complet, en lui montrant que mon enfant mineure n’allait pas bien, certes, mais que je faisais tout mon possible pour qu’elle soit soutenue, et que j’étais là moi aussi pour elle.
Après cette lettre, j’ai dû malgré tout me rendre à deux rendez-vous pour parler avec cette dame. J’y allais dans l’optique d’une conversation d’égale à égale, entre deux adultes responsables, et j’ai cru que c’était le cas : l’AS semblait à l’écoute, bienveillante, « oui-oui je comprends ce que vous dites », disait-elle.
Le premier rendez-vous a été informel, elle a voulu savoir des tas de choses sur ma vie, jusqu’avant la naissance de ma fille, et si l’accouchement s’était bien passé, et mon mari, etc…
Au deuxième rdv, je n’avais pas envie qu’elle regarde à nouveau ma vie, comme une voyeuse, ça me mettait mal à l’aise . Je lui ai préparé un topo sur l’anorexie, pour lui montrer à quel point c’était complexe, et que son regard d’assistante sociale n’avait pas le pouvoir de changer ce qui arrivait.
À la fin de l’entretien elle m’a dit qu’elle avait toujours eu l’intention d’envoyer le dossier au procureur. Autrement dit l’information préoccupante allait se transformer en un signalement judiciaire parce qu’elle l’avait décidé !
Je lui ai demandé pourquoi, à quel moment j’avais mis ma fille en danger, qu’est-ce que je devais faire de plus; ses réponses étaient vagues : j’étais peut-être trop à l’écoute de ses besoins, je devais peut-être «me faire aider», peut-être qu’une «aide éducative», un «soutien à la parentalité»….
Elle n’avait donc rien écouté ou rien compris, ne voyant que l’intérêt de mettre en place des dispositifs pouvant créer de l’activité pour les services de l’ASE ! Vraiment j’étais la cliente idéale !
Elle a demandé à voir ma fille, et j’ai dit non, et je lui ai dit pourquoi : ma fille était encore fragile, elle se remettait de moments difficiles, elle commençait à se reconstruire, elle n’avait pas besoin de venir papoter au sujet de sa dépression avec une assistante sociale.
Comprendre pour remédier
C’est ultérieurement à l’acharnement de la travailleuse sociale que ma fille a été «détectée haut potentiel », et cette découverte l’a bien aidée dans sa reconstruction intérieure. Elle a entamé une psychothérapie avec quelqu’un de formé à la douance, (c’est comme ça que nos cousins québécois appellent la «précocité») elle a changé de lycée, elle va mieux, nous respirons enfin.
Idiocratie
ET PUIS PAF ! Un an plus tard : convocation devant la juge des enfants.
J’ai demandé à avoir accès au dossier de l’enquêtrice sociale, avant l’audience, parce que j’étais curieuse de voir ce qu’elle avait bien pu trouver de si GRAVE à communiquer au juge, alors que nous nous étions quand même quittées de façon assez cordiale, et qu’elle n’avait jamais été en mesure de dire quoi que ce soit de précis à ce sujet.
En fait, cette AS a trouvé que j’étais «dans une posture de contrôle» lors notre entretien (je contrôlais la conversation, mon topo sur l’anorexie) et elle en a déduit que je contrôlais la vie de ma fille de façon pathologique, jusqu’à nier son existence.
Paradoxalement, elle me reprochait d’avoir accepté, «sans recul ni réflexion», le souhait de ma fille de changer de psy, qu’elle a transformé en «arrêter les soins».
Je vous recopie un petit bout de sa conclusion :
« Madame refuse un entretien avec sa fille et une visite à domicile. Elle se situe dans une posture de contrôle et par ce biais annule sa fille en ne la faisant pas exister. Elle n’est pas en capacité de se remettre en cause ou de développer un questionnement qui témoignerait de son intérêt pour elle autrement que sur un plan médical.»
Elle souhaitait vivement une expertise psychologique pour moi.
Lors de l’audience avec la juge je venais encore, naïvement, avec mes belles idées de communication non violente et d’entretien d’adulte à adulte, pour parler sereinement de ce qui s’était passé, de comment nous avions fait face, de la situation actuelle, etc…
Je me disais « ma fille va mieux, la juge va bien prendre en considération tous les éléments que je lui donne ». QUE NENNI ! Quelle conne j’étais, de penser pouvoir parler normalement avec cette juge, alors que je n’étais qu’une mère coupable et incapable : elle a été cassante, méprisante.
Elle a d’abord reçu ma fille et ne l’a ni écoutée ni crue : non, elle n’allait pas bien; non, elle ne pouvait pas avoir de projets, non, sa mère n’était pas à la hauteur; non, elle ne savait rien à rien; ça a fini par énerver ma fille, qui a adopté la même attitude que la juge, et est sortie en me disant, désabusée: «c’est une c…nasse».
Je suis passée ensuite: en cinq minutes cette juge a démoli 16 années d’éducation patiente, tissée au fil du temps avec mon enfant. J’étais définitivement une nullité sur pieds, femme incapable de garder son mari (elle a ressorti pendant 10 minutes des trucs vieux de 16 ans ), mère dangereuse pour sa fille, et limitée du cerveau car n’ayant rien compris au dossier de l’ASE, qu’elle a avalisé les yeux fermés.
Verdict : l’unique cause du mal-être de mon enfant c’est mon divorce.
Et allez hop ! MJIE, avec visite à domicile, je n’avais qu’à pas la refuser lors de la première enquête sociale.
Cette audience m’a successivement démolie (on n’est pas de pierre), et mise en COLERE !
Cécile P