Les 1 000 jours du flicage social

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La Stratégie nationale de protection de l’enfant (SNPPE) lancée en 2019 alerte sur les 1 000 premiers jours de l’enfant.

Ses 11 objectifs, plus particulièrement axés sur la surveillance des familles modestes, ont donné lieu à des contrats entre 40 conseils départementaux, l’État et les ARS avec financements à la clé.

Comme vous pourrez le constater ces objectifs rentrent dans la logique :

« Si tu ne vas pas à l’ASE, l’ASE ira à toi ».

Le premier objectif « Atteindre à horizon 2022 un taux de couverture par le service de protection maternelle et infantile (PMI) d’au moins 20 % des entretiens prénataux précoces ». Ces entretiens prénataux couvrent certes 29 % des grossesses en 2016, mais 9 % seulement de ces entretiens sont réalisées par les PMI puisque la majorité de ceux-ci concernant des familles de milieux plutôt moyens et aisés qui préfèrent les réaliser en milieu libéral. Le syndrome du dispensaire apparaît là encore puisque passer de 9 % à 20 % des entretiens prénataux en PMI suppose de viser plus d’un doublement des familles modestes concernées. Ceci devrait permettre un repérage des parents dont les enfants pourraient être retirés dès la naissance ou entrer dans un dispositif de suivi contestant l’aptitude à la parentalité à partir d’information préoccupantes anténatales.

C’est à partir de ce repérage qu’est conçu le troisième objectif qui est le « doublement au niveau national du nombre de visites à domicile pré et postnatales réalisées par des sages-femmes de PMI en faveur des familles vulnérables ». On peut effectivement bien considérer que ces familles dites vulnérables sont celles qui ont fait l’objet d’un repérage prénatal, ce qui confirme la volonté de doubler le nombre de mesures qui en résulteront notamment à partir de la transmission d’informations préoccupantes postnatales.

Le doublement des mesures ASE pour les familles repérées dès avant la naissance, n’est cependant pas suffisant. Là encore des objectifs quantitatifs sont fixés pour l’extension des interventions des sociaux avec personnels supplémentaires, budgets et infrastructures aux frais des contribuables.  Ainsi ce sont, d’après le quatrième objectif, «  au niveau national au moins 15 % des enfants qui bénéficieront de l’intervention à domicile d’infirmières puéricultrices de la PMI en particulier jusqu’aux deux ans de l’enfant en faveur des familles vulnérables ». Doit-on alors considérer que 15 % des familles françaises soient des cas sociaux, c’est ce qui semble être posé avec, à la clé, une surveillance et des mesures pour 15 % des enfants de moins de deux ans.

15 ou 20 % puisque le cinquième objectif énonce que « au niveau national, au moins 20 % des enfants bénéficient de consultations infantiles en PMI correspondant à des examens de santé obligatoire du jeune enfant, en particulier pour les enfants jusqu’à deux ans ». Il y aurait donc 20 % de familles modestes et potentiels cas sociaux puisque si les trois quarts seront contrôlés à domicile (les moins fiables), un autre quart sera convoqué à la PMI.

Les conseils départementaux font le forcing pour inciter les parents à consulter les PMI en mettant en avant la proximité, la bienveillance et la gratuité, la réalité est tout autre.

Mais ce n’est pas encore assez. Ainsi pour les parents qui auront échappé à ce criblage, le deuxième objectif est de « faire progresser le nombre de bilans de santé en école maternelle réalisés par la PMI et se rapprocher du contenu de l’examen de santé tel que défini dans le carnet de santé ». Ceci permettra de dépister ce qui pourrait être considéré comme maltraitances ou délaissements, notamment à partir de courbes de croissance et de poids non conformes, de troubles du comportement et de l’apprentissage suspectés, et ce dès la maternelle opportunément rendue obligatoire dès l’âge de 3 ans puisque l’on reste dans les 1 000 premiers jours.

La gestion de toutes les données de sociaux partagées entre les services de l’Etat, PMI, ASE, ARS, Education nationale, devrait permettre des mesures plus rapides, voire expéditives puisque les sixième et septième objectifs sont « le renforcement des moyens, des ressources et de la pluridisciplinarité des cellules de recueil des informations préoccupantes (CRIP) pour atteindre sur l’ensemble du territoire un délai maximal de trois mois par évaluation en systématisant et renforçant les protocoles informations préoccupantes (IP) ».

Les autres objectifs obligatoires peuvent relever de vœux pieux comme ce huitième objectif qui parle de « systématiser un volet « maîtrise des risques » dans les schémas départementaux de protection de l’enfance, incluant un plan de contrôle des établissements et services ». On y mettra ce que l’on voudra sachant qu’à moins d’envoyer une équipe de télévision tous prétendent que l’on salit la profession de sociaux en disant ce qu’il se passe dans les services.

Le neuvième objectif engage à « garantir l’accompagnement de tous les enfants protégés en situation de handicap. » Comique lors l’on sait qu’en France on place des enfants autistes.

Les dixième et onzième objectifs visent à laver plus blanc que blanc les sociaux puisqu’il s’agit de « systématiser la participation des enfants et des jeunes aux observatoires départementaux de la protection de l’enfance (ODPE) et de renforcer l’ODPE ». Les enfants placés pourront donc donner leurs avis, enfin ceux qui contestent leur placement et échappent au bourrage de crâne antifamilialistes ne sont pas certains d’être entendus.