La méfiance des rois mages

L’arrivée des rois mages

Noël célèbre la naissance de l’enfant Jésus à Bethléem, dans une mangeoire entourée d’un âne et d’un bœuf. Ayant pour berceau un lit de paille ajusté sur la mangeoire d’argile, l’enfant reçoit la visite des rois mages dans une simple étable ou bien une grotte aménagée pour le bétail.

Une situation impensable de nos jours qui aurait conduit au placement immédiat du bébé.

Elle  était aussi précaire dans le contexte de l’époque, qu’il nous appartient de préciser d’autant qu’une visite d’étrangers à la famille eut lieu peu après la naissance.

Qui sont ces rois mages témoins du dénuement dans lequel l’enfant Jésus est né ? Quel rapport ont-ils avec les autorités ?

Menés par l’étoile de Bethléem, les rois mages n’auraient pas été de véritables monarques, mais ils furent les hôtes de marque du roi Hérode dans son palais. Ils lui mentionnèrent imprudemment l’objet de leur voyage. Hérode, intrigué, les pria de passer le voir à leur retour afin de lui indiquer précisément où était né l’enfant afin qu’il puisse aussi lui rendre hommage à sa façon.

Nos rois voyageurs apparaissent donc bien, a priori, comme des indicateurs des autorités gouvernementales, même si telle n’était pas leur vocation.

Hérode représente cette autorité sur la terre de Judée. Il accueille les voyageurs en son palais et se propose lui aussi de faire des cadeaux, ce qui se matérialiserait par le soutien apporté à l’enfant Jésus et à sa famille. Ne pouvons-nous pas là discerner aussi une promesse d’assistance sociale, de protection maternelle et infantile, d’aide sociale à l’enfance ?

Une aide dont vont se méfier les rois mages.

Peu inspirés par les promesses d’Hérode, ils choisirent de revenir chez eux par un itinéraire détourné afin d’éviter la visite de signalement promise au roi. Ils firent bien comme nous éclaire à ce sujet l’évangile de Mathieu. Car en ce temps-là, le roi Hérode craignait la naissance d’un roi des Juifs qui mettrait fin à sa suprématie.

Le verset en question est le suivant : « Alors Hérode, voyant qu’il avait été joué par les mages, se mit dans une grande colère, et il envoya tuer tous les enfants de deux ans et au-dessous qui étaient à Bethléem et dans tout son territoire, selon la date dont il s’était soigneusement enquis auprès des mages. Alors s’accomplit ce qui avait été annoncé par le prophète Jérémie : ‘Ainsi parle l’Éternel : On entend des cris à Rama, des lamentations, des larmes amères ; Rachel pleure ses enfants ; elle refuse d’être consolée sur ses enfants, car ils ne sont plus. »

Oui, Hérode régnait depuis 37 avant JC et se serait donc méfié des enfants à naître.

Les historiens débattent encore de cette méfiance et des conséquences administratives et criminelles qui en résultèrent. Paul Veyne, du Collège de France, reprend à ce sujet le témoignage de l’écrivain latin du Vième siècle, Macrobe. Citant l’empereur romain César Auguste, Macrobe lui fait dire qu’il valait mieux être le cochon d’Hérode que son propre fils puisque Hérode aurait aussi fait tuer son propre fils âgé de moins de deux ans alors que les cochons étaient épargnés en Judée.

Mais l’empereur César Auguste n’avait-il pas facilité cette immonde besogne par son édit ordonnant le recensement des nouveau-nés ?

Cette formalité administrative fut accomplie par Joseph qui voulut faire accoucher Marie dans la ville de Bethléem dont il était originaire, devant aussi se faire recenser au lieu de sa naissance ainsi que le précise Luc l’Évangéliste. L’ensemble des foyers d’enfants à peine nés pouvait alors être signalés afin que le massacre commence.

Nous retiendrons que Jésus fut sauvé des autorités étatiques par la méfiance de ceux qui ne collaborèrent pas avec les recenseurs d’enfance.

Les illustrations de cette homélie sont offertes par Véronique Dithiot, une Cédifienne dont la crèche, confectionnée par son talent, se visite dans sa propriété située 7, Chemin de Paillard à Nanteau sur Essonne.